Namas…Pfff… te !

 

Oui, arrivée à Lobuche, dernière étape avant le camp de base et 4950 m d’altitude, on commence à sentir l’oxygène qui se raréfie lors de chaque mouvement…

D’après l’échelle Altitude/Taux d’oxygène par rapport au niveau de la mer, on doit en être en gros à 50 % et ce taux devrait graduellement diminuer jusqu’à 33 % résiduels au sommet de Sagarmatha, mais bon, il est vrai qu’on aura les bouteilles d’oxygène donc la sensation la pire devrait être entre le camp III et la camp IV logiquement…

 

Revenons-en à nos Yaks…Lobuche et le trek du matin…

C’est encore un grand soleil qui nous accueille et par contre… une grosse douleur aux jambes… Ahh, j’ai voulu faire mon malin en descendant les mille mètres en courant et bien j’en sens les conséquences aujourd’hui… C’est du bois mes jambes !

Et bien je vais peut être pouvoir me rembourser dans un monde désormais minéral où ne demeure plus que broussailles et, pour la flambée vespérale, bouses de yaks !

 

Parce qu’ici, plus de cadeaux ! Quand je veux recharger l’ordinateur, on est passé du régime gratuit, à celui payant du bout des lèvres mais en négociant un peu et en souriant beaucoup j’arrivais à m’en sortir à une recharge à l’œil… l’étape suivante est devenue 150 Roupies la recharge quelle que soit la durée et ici, ils chargent 300 Roupies de l’heure, et spécialement parce que j’ai un laptop (oui, je me la pète là, un portable quoi !) et bien ils veulent me faire payer 500 Roupies (5 €) de l’heure !!!

Non mais, je vais négocier chez le voisin… y a pas marqué, puceau du voyage là !

 

Demain sera la dernière étape de repos afin de parfaire notre acclimatation mais si mes jambes l’autorise et si la météo est toujours aussi clémente on devrait essayer de grimper jusqu’au superbe panorama du khala pathar (dans les 55OO m) qui donne le meilleur angle de vue sur l’Everest et ses vertigineux voisins…

Je sais que je me fais de la pub mais si vous faîtes un tour sur notre site (avec le bpb), www.arrets-sur-images.fr dans la rubrique Népal (bah oui, pas Madagascar hein… ?) vous trouverez cette merveille au coucher du soleil en mode panoramique…

 

Et après-demain, ce sera définitivement parti pour les 38 jours d’escalade graduelle avec montées/descentes et phases de repos au camp de base.

Joseph (toujours aussi bien organisé) a d’ailleurs apporté le programme détaillé et, à l’instar d’un prisonnier, coche quotidiennement le jour écoulé…

Il a, à la fois hâte de se mesurer au Géant de la Planète mais en même temps (et on a pas mal en partage à ce niveau là…) il n’arrête pas de me montrer la photo de son tout mignon 9ième ( !!!) et dernier petit – enfant, qui habite chez lui avec sa fille et qu’il a donc l’habitude de chouchouter au jour le jour…

La libération de la Montagne n’est pas pour tout de suite et je me dis qu’il faut quand même être maso pour tant de sacrifice… en espérant que le plaisir final soit à la hauteur… en tout cas la  joie quotidienne l’est, à la hauteur, mais je me trouve bien tributaire de la météo…

C’est clair que des rafales de neige et l’obligation perpétuelle de se précipiter dans le sac de couchage et je n’apprécierais moins et considérerais plutôt cette aventure comme une prise d’otage…délibérée en plus !

 

La montagne est d’une Beauté (ça mérite bien une majuscule !) à couper le souffle… Ça se confirme et comprends mieux pourquoi je souffle comme un… Yak… on en revient toujours à cet animal sacré.

Le Dieu vivant des montagnes, l’Animal (et allez, soyons fous, encore une…) qui sert à tout !

L’animal qui sert en premier lieu bien sûr à transporter, transporter les bagages des expés et transporter les biens nécessaires aux besoins  locaux. L’animal dont les poils vont servir à fabriquer des chauds tricots et autres couvertures, dont le lait va permettre d’être bu, transformé en beurre et en fromages, dont la bouse peut être brûlée, et finalement dont les os pourront être sculptés pour l’artisanat local !

Reste la viande, faut que je me renseigne pour savoir si le yak n’est pas suffisamment sacré pour pouvoir être bouffé un de ces jours, quand il devient trop vieux, fourbu et plus suffisamment ingambe… suite au prochain numéro sur cette question qui tombe pile poil !

 

Ah, j’imagine les petites estafettes aux gares R.E.R…. Pizza cuite au feu de yak, saveur montagnarde garantie… ça aurait de la gueule quand même…

Je vais me renseigner au retour, y a du business à faire mais il doit falloir prévoir un container rien que pour lui, et ptêt’ une yakette aussi !

 

 

 

 

 

Ben la voilà qui se profile la journée de repos et ça va être de la VRAIE journée de repos cette fois ! Ouh là là , avec ma couillonnerie d’avant-hier mes jambes sont toujours détruites, et paradoxalement je ne me sens pas comme un poisson dans l’eau…

 

Ouais, ouais, vous allez dire, c’est pas du high level cette blague… Ok, ok… je le concède, mais bon, circonstance atténuante je n’ai dû dormir que deux ou trois heures la nuit dernière…

Déjà, c’est incroyable la différence de température dès que le soleil se couche et il ne reste alors  plus qu’à se précipiter dans le sac de couchage pour éviter le combat de chaque minute contre les tremblements de froid, et puis surtout, une fois la bonne température trouvée tout au fond du duvet, le principal problème demeure le souffle coupé…

C’est vraiment difficile de respirer la nuit, et je ressens un peu l’éphémère crise de claustrophobie que je n’avais pas appréciée dans l’étroiture de mon initiation de spéléo il y a deux mois…

 

Ce qui me rassure, c’est qu’au petit déjeuner, je me suis rendu compte que quasiment tous les autres membres de l’équipe affichaient les mêmes cernes résultant d’une insomnie similaire…

Il n’empêche que mon penchant naturel au manque de confiance en moi est en train de reprendre le dessus… je vois Joseph qui n’a toujours pas utilisé son sac de couchage pour dormir mais uniquement les fines couvertures fournies… alors je me dis que je suis bien mal barré, déjà transi de froid dès que le soleil se couche…

 

De plus, nous croisons plein d’alpinistes ayant déjà conquis 4 ou 5 sommets de plus de 8000 mètres et qui respirent (la chance…) l’assurance et la sérénité, alors là encore, je me dis que je ne suis pas à ma place…

 

Enfin, seul élément pour me rassurer, c’est que ce manque de confiance en moi apparaît comme chronique et que toutes les montagnes déjà embrassées de tout en haut m’avaient apporté dans un premier temps le même sentiment d’infériorité… Wait and see donc…

 

Plus les jours s’écoulent et plus je me dis que ça va être long cette aventure, demain nous n’arriverons qu’au camp de base et alors, ce sera un compte à rebours de quasiment 40 jours… !!!

Pffou… 40 jours d’attente, d’avancées et de reculs de fourmi… 40 jours à lorgner le sleeping bag comme on attend le Messie, et comme il ne faut pas prendre les Messies pour des lanternes, et ben… et ben… j’y vois pas bien clair pour l’instant…

 

Tiens oui, au rayon des descriptions quotidiennes, j’adore le système népalais des portes coupe-feu… Ils accrochent à la porte, une ficelle à l’extrémité de laquelle est suspendue une bouteille de plastique lestée de pierres, ce qui fait que lors de l’ouverture de la porte, la bouteille se retrouve soulevée, et alors, son poids naturel active la fermeture automatique de la porte… Pour une fois que je comprends un mécanisme « de bricoleur », va falloir t que j’essaie à la maison à mon retour…

 

Voilà, je termine ce message en me lézardant sous ce soleil si bienfaiteur, soleil que le portable devrait également apprécier parce que manier la souris relève ce matin de l’exploit… j’ai l’impression qu’elle a choppé la tremblante du mouton avec le froid nocturne et lorsque que j’essaie de diriger le curseur, je dois me satisfaire d’une zone de 5cm² au sein de laquelle ça gigote ça gigote…

 

Allez, profitez bien de ces beaux ciels tourmentés du mois d’avril qui alternent ( ??) grosse pluie, lumineux soleil, grêle, et noirceur intense…

 

Pheri… Pfff…Pfff, Bhe…Pfff…Pfff…, Tongla !