Corrida
C’est tout d’abord du sable, des gradins, du tumulte
éventail à la main pour célébrer le Culte,
on blablate, on pérore, on suppute, on commente
cette vie tirée au sort, sur la mauvaise pente.
Au cagnard ou à l’ombre, les sens sont en émoi
on trépigne, on attend, l’arrivée du beau Roi,
un roi à la Louis XVI, sa tête sera tranchée
et sa queue et ses couilles, restera la trachée
Ici ça sent la Mort, mort passée, mort à venir
un Roi tombe dans l’arène, quel humour à vomir
Un Roi de pacotille au Destin si tragique
élevé comme un Dieu, pour chuter, c’est logique…
Revenons aux moutons qui attendent l’abattoir
Tauromachie machiste, magie au goût barbare
Les plus impécunieux au soleil transpirent drus
De la sueur pour du sang, c’est l’alchimie du cru
Quelques timides Olés s’ajoutent au tintamarre
jusqu’au tohu-bohu quand débute la fanfare.
Alors la bête arrive, avide de lumière
dans cette arène aride, fait d’Ibère , fétide bière.
Elle s’agite affolée, nerveuse et impatiente
Quand elle sent le traquenard, sa salive sent la fiente
Tout est déjà trop tard, Élysée ou Tartare… ?
La bête soudain s’effondre, la douleur est sans fard.
Pas le moindre suspense, l’asticot fait le paon
Sous les bravos ravis et les mouchoirs blancs.
On exulte on trépigne…les oreilles et la queue !
Quel matador insigne, quel homme valeureux !
C’est vrai qu’il faut le faire, torturer à la mort
une bête sous somnifères, aidé de picadors
planqués à dos de cheval, témoin si incrédule
d’un meurtre bien tribal, d’un rituel qu’on adule…
Ici ça sent l’Enfer, le sang mêlé de fer,
le bovidé vidé, défait thuriféraire…
Corrida corrodée, encore un corps hideux
Une vie perdue aux dés pour des pervers odieux.